lundi 7 août 2017

Pavillon noir et talons aiguilles 5 : L’île noire

La brune marche à quatre pattes, tentant de s’éloigner en toute discrétion, hors de ce tumulte. Mais au moment où elle pose la main sur la poignée de la porte et qu’elle s’apprête à s’élancer au dehors, une botte se pose sur sa laisse traînant à terre, la clouant au sol. ? »

« Où croyais-tu aller ? Twa petite écervelée, pas réfléchir beaucoup. » Les autres filles se retournent et la regardent interloquées, alors que nous tournons la tête dans leur direction. Nos tourmenteuses se sourient, tandis que s’évanoui dans nos yeux tout espoir d’évasion. Sans un mot, nous nous adressons un regard interrogateur, tout en priant silencieusement toutes les déesses et les dieux de l’Olympe et d’Asgard réunis.

Les trois pirates se tournent vers la servante de Sarah. La botte qui me cloue au sol m’abandonne suffisamment longtemps pour que je puisse me redresser et voir sur la table un livre couvert de cuir tanné par les ans et sa couverture écornée portant des feuillets parcheminés élimées et cornées.




La main de Stéphanie, posée dessus m’empêchent de lire, mais je peux y remarquer des glyphes, dont un triangle inversé portant un trait partant de son sommet le plus bas jusqu’à son centre, ainsi qu’un plan de l’île entourée de flots où nagent des animaux fabuleux. Je surprends les mots « d’île noire » et de « rocher des tempêtes », sans trop rien y comprendre.

Soudain, un coup de poing rageur sur la table me tire de ma contemplation dans un sursaut et je me retrouve à terre. Puis d’un index impérieux, de la colère dans la voix, la blonde Stéphanie ordonne les dents serrées « embrasse mes bottes, et restes à ta place petit mâle. »

Aussitôt, Pauline se tourne et la regarde tout sourire « Lèches bottes c’est un nom qui te va comme un gant. » Les autres approuvent, tandis que Yoo-Me ramène Fadi vers le mur opposé et l’y enchaîne sous le regard courroucé de Sarah, qui pourtant ne pipe mot.




C’est à mon tour de faire l’objet des rires, et alors que paralysé, je ne m’exécute pas, la morsure d’une lanière sur les fesses me décide à obéir. Tirant la langue, désormais maté, je lèche ses cuissardes noires, à quatre pattes, les fesses en l’air. Je tremble à l’idée de recevoir une nouvelle correction.

Sous le regard méprisant de mes trois ravisseuses, Sarah est assignée au service. Les dents serrées, le regard baissé, elle s’exécute, entravée par des chaînes courtes aux poignets et aux chevilles, toujours vêtue de ses nippes. Allant et venant entre le foyer où chauffe un ragout dégageant une odeur épicée dans la pièce.

Du dehors, nous parviennent les secousses lointaines, le bruit des vagues et le vent qui forcit. Les trois amies nous déposent à Sarah et à moi les assiettes aux pieds avec les reliefs de leurs repas. Épuisés, le ventre vide nous ne nous faisons pas prier. Sarah interroge du regard Yoo-Me qui d’un geste méprisant l’autorise à porter sa pitance à sa compagne.

Plus tard, après nous avoir fait prodiguer des soins labiaux, les trois dresseuses après avoir longuement disserté à mi-voix, avec des airs de comploteuses, nous enchaînent pour la nuit aux anneaux, fixés sur les murs, tout en prenant soin de nous séparer. Pauline nous distribue alors des couvertures tout en nous commandant de dormir.

Enfin elle retourne auprès de ses amies et se glisse à leurs côtés sous une couette épaisse et duveteuse. Il ne reste que le bruit des cendres dans l’âtre et la danse des ombres s’allonge sur les murs, puis les minutes passent et les heures.

Plus loin, mes deux codétenues tentent bien de communiquer en murmurant et en grattant la pierre sur le sol. Cette tentative ne leur occasionne que des réprimandes du trio infernal qui se redresse, poitrines nues et chevelures défaites et la promesse d’un « bain de minuit » si elles ne cessent pas immédiatement, appuyant ses mots d’un claquement de fouet.




La menace fait son effet et dans un concert de grognements et de rires de parts et d’autres de la pièce, le calme revient et je glisse lentement au pays de Morphée en me pelotonnant à demi et en rêvant de formes généreuses et des courbes appétissantes de furies déchaînées.

Malgré moi, je me sens durcir et passe la langue sur les lèvres en me caressant doucement, de peur de faire du bruit, calmant mon angoisse comme un grand singe. Étouffant un râle, j’essuie tant bien que mal les reliefs de mon plaisir solitaire, tandis que Sarah pouffe de rire dans son coin sans encourir cette fois les foudres des trois amantes.

Bientôt, il ne reste que des cendres et le sifflement du vent au dehors, des reniflements et éternuements. Un dernier sifflement dans l’âtre, puis le feu rend l’âme. Des gloussements et des soupirs remplissent à nouveau l’espace, puis le silence et des respirations régulières quand enfin le sommeil me prend.


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