mardi 8 août 2017

Pavillon noir et talons aiguilles 6 : Figures de proue

Au matin, je suis réveillé par une pluie fine et malodorante, qui s’écoule sur mon visage et rentre entre mes lèvres et mes narines. Je tousse et crache sous les quolibets alors que l’on me tire par les cheveux. « Tu n’aimes pas ce que je t’offres ? On m’avait pourtant affirmé le contraire ! »

Encore ensommeillé, la queue tendue et raide, j’ouvre les yeux et lève la tête dans un couinement pathétique. Des étoiles dansent devant mes yeux et je découvre petit à petit ma nouvelle Maîtresse autoproclamée et les deux chasseuses de primes hilares. « Bonne douche du matin » déclare Yoo-Me. « Ca bon pour twa. »

Une claque achève de me réveiller, et alors que je sens encore mes oreilles bourdonner, elle me présente son triangle sacré et m’ordonne de les lécher. « Tu as intérêt à t’appliquer », et Pauline d’ajouter « fais comme tu sais faire lèche bottes ! » Intimidé, je m’exécute et pose la langue sur ses lèvres roses pour en ôter toute trace.




Sa respiration s’accélère. Elle me fait me tourner sur le dos et me chevauche en me baisant la bouche, à cheval sur mon visage sous la surveillance de ses acolytes et des deux autres captives. Toutes se délectent du spectacle.

Puis remettant nos laisses, elles nous entrainent tous trois, à quatre pattes sous un grand ciel bleu vers le ponton où est amarré le voilier. Je dois cligner des yeux et ralenti en sortant de la cahutte, ce qui me vaut réprimandes et fessée. Pauline porte sous le bras le précieux volume, promesse de tant de trésor, qui m’a déjà valu tant de déboires. Je n’ose lever les yeux pour le regarder.

Nous embarquons, mais au moment de nous faire descendre vers la cabine, Stéphanie a soudain une idée. « Attachons les au mat. Ça serait dommage de ne pas avoir de figure de proue. » Les autres acquiescent en riant et nous voilà quittant la crique, alors que les vagues balayent nos visages. J’entrevois, les yeux assaillis par l’eau salée, les dégâts des séismes et des coulées de laves encore fumantes.

A peine atteignons-nous le large, que la mer se forme et que de gros nuages noirs s’amoncellent au-dessus de nos têtes. Pauline et les deux autres femmes ont fort à faire pour manœuvrer le bateau et je reçois les assauts des vagues qui sont comme autant de formes féminines aux formes généreuses, caressantes comme des amantes trop empressées.

Je perds le compte des heures, seulement conscient d’être détaché et ramené à bord, puis descendu dans la cabine. Je semble flotter comme dans un rêve étrange. Ais-je été capturé par des néréides ou d’autres créatures marine à corps de Femmes ? Je ne sais, tant j’ai l’impression de flotter entre deux mondes, manipulé par des mains experte, fagoté et déposé dans un coffre. Leurs paroles me semblent tellement lointaines que je n’en saisi pas le sens.

Un téton se présente devant ma bouche que je happe par réflexe, ce qui me vaut des caresses et quelques mots doux. Puis un tuyau est introduit dans ma bouche desséchée d’où s’écoule un liquide familier et je sombre aussitôt dans des abysses peuplés de sirènes affriolantes où Maîtresse Véronique, une couronne sur la tête, les seins fendant l’écume et des nageoires en guise de jambes, m’entraine avec un grand sourire aux lèvres.




Un bruit, un raclement et un gland « plouf » me tirent du monde des ombres dans sursaut. Des bruits de pas légers, des raclements, on m’extrait sans ménagement de mon réduit pour m’emmène captif, dans la nuit, vers je ne sais trop quel nouveau lieu de perdition. Recroquevillé dans un recoin, emballé dans ma toile de jute, je sens des bras puissants se saisir de moi et m’emmener sur des épaules. On me descend dans une barque ou je rejoins deux autres colis aux têtes familières.

Nos bouches distendues par les boules ne peuvent articuler l’angoisse qui se lit dans nos yeux. D’autres passagers prennent place et sous les ordres de la voix que je reconnais comme étant celle de Stéphanie, le frêle esquif s’éloigne vers le rivage, au bruit des efforts des efforts des rameurs et du clapotis qui heurte la coque. Au loin le ressac annonce la plage où nous nous échouons.




Le ressac crisse sur les galets. Des ordres secs sont prononcés par celle qui a présent e possède et nous voilà débarqués, hissés dans la benne d’un pick-up par une nuit de pleine lune. En souriant, elle contemple ses prises, puis referme le capot. Le moteur démarre m’entrainant à nouveau vers la servitude, aux ordres d’une nouvelle Maîtresse, tout aussi vicieuse, mais nettement plus sévère, d’après ce que j’ai pu juger, que toutes celles que j’ai pu connaître jusqu’à présent.

Depuis mon réduit, des bruits de klaxons confirment que nous avons bien rejoint la civilisation. « Oui mais sous quels cieux ? » Alors que près de moi, les formes de la brune et de la blonde s’agitent dans le noir. Je sens leurs corps remuer et me heurter. Enfin, le véhicule s’arrête, des bruits de pas, des aboiements, et le crissement des pneus sur le gravier m’informent que nous sommes arrivés.


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