En fin d’après-midi, nous
remontons frais, joyeux et détendus en chantonnant vers la maison de nos hôtes.
Au loin, le tintement de clochettes, le cri d’un berger, bêlements et les
aboiements d’un chien tout proches se font entendre sur fond de pinède, d’odeur
de lavande et de romarin. Le concert des cigales salue notre passage.
Guidé par la laisse par les deux
amies, cheminant bras dessus, bras dessous, je ramène les serviettes et leurs
effets. Les yeux fixés sur les ondulations de leurs fesses, je ne fais pas trop
attention au chemin dans les feux du soleil déclinant.
Nous parvenons enfin, à la
terrasse de la maison qui semble déserte et la maison fermée. Quelques heures
plus tôt, nous y avions laissé notre hôtesse toute occupée à laisser sécher ses
ongles peints. Sur la table, à l’ombre d’un parasol, à présent débarrassée et
nettoyée, ne se trouvent qu’un magazine Féminin et des lunettes de soleil.
Les filles jettent un œil au
magazine puis décident de faire le tour de la maison, juste à temps pour voir
la voiture de nos hôtes s’éloigner sur le chemin de terre qui conduit à la
maison. Le jour fait place peu à peu à l’obscurité alors que revient à nos
oreilles, le cri du hibou et au loin des aboiements.
La lumière s’allume tout près de
la grille, au bout de l’allée et Maîtresse me demande d’aller voir ce qui s’y
passe. Pas très rassuré, je jette un œil vers elle et Hélène. Elles
m’encouragent de leurs caresses sur ma queue, en me promettant des plaisirs
inouïs chuchotés dans l’oreille et en frottant leurs poitrines contre mon
torse.
Un peu rassuré, tout émoustillé
et ne souhaitant pas les décevoir, je m’engage d’un pas hésitant sur l’allée
principale. Le portail ouvert sur le chemin et l’obscurité et la nuit. Le hibou
se fait à nouveau entendre, plus proche, ainsi que des aboiements dans le
lointain. Et là n’est-ce pas des cors. Je ne rêve pas, on chasse en ces lieux à
cette heure, mais pour quel gibier ?
J’entends distinctement la
portail se refermer ainsi que des pas derrière moi. Nu dans la fraicheur de
cette nuit d’été, je frissonne mais instinctivement, je m’élance et cherche
refuge dans les bois tout proches. Le manteau de la nuit m’enveloppe alors que
les pas et les aboiements se rapprochent. Artémis elle-même me donnerait –elle
la chasse ? Me voici courant éperdu tel un cerf, traqué apeuré et repoussé
vers la nasse que l’on me tend et vers laquelle on me repousse.
Sur la droite des bêlements. Je
m’y dirige, espérant semer mes poursuivants en mêlant mes odeurs aux leurs,
alors que les clameurs toujours plus proches se font entendre dans mon dos. Un
enclos, une bergerie et sa construction massive qui se détache dans le halo de
lumière de cette nuit de pleine Lune.
Mais quelle n’est pas surprise
d’y découvrir un visage masculin vêtu d’une peau et d’une peau de mouton.
Accroupi, il me dévisage, bâillonné et attaché à une mangeoire. Près de lui
d’autres formes sont allongées, recroquevillées et vêtues de la même manière.
Certains relèvent la tête, inquiets.
Une lumière s’allume à
l’intérieur du bâtiment et une forme portant un manteau à capuche s’y découpe
alors que derrière des voix Féminines se font entendre distinctement, des
bruits de course, de cors et de jappements surexcités. « Ils sont là sur
mes talons. » Je saute par-dessus l’enclos et en ressort plus loin,
espérant les semer, zigzagant au milieu de ses occupants grognant, surpris dans
leur sommeil.
Parvenu à l’orée du bois, dans la
sécurité relative de la nuit, je m’appuie essoufflé contre un arbre et
m’apprête à reprendre ma course, lorsque soudain, dans un craquement de
branchages, le sol se dérobe sous mes pas et je tombe en contrebas sur un lit
de feuilles mortes.
Les pas se rapprochent et
encerclent la fosse dans laquelle j’ai chuté. Le cor retenti, les jambes et des
formes Féminines m’encerclent, des jappements et des cris retentissent. Alors
que éberlué je me redresse en me frictionnant les fesses endolories, je
distingue dans la lueur de l’astre de la nuit, des visages de chattes, de
louves, de belettes et d’ourses. « Je suis le gibier et me voilà
pris ».
On me tend une corde et me voilà
tiré sans ménagement de ce réduit où je suis confiné. Me voilà enchaîné,
affublé d’un masque à tête de cerf et entraîné nu dans la nuit vers une clairière et un chêne centenaire
pour y être enchaîné, entouré de formes féminines virevoltantes aux têtes
animales qui tournent et se frottent contre moi. Pour un peu, je jurerais les
connaître. Des projecteurs éclairent la scène insolite dont je vais être le
clou du spectacle. Tambours et cors se déchaînent au rythme de mes
palpitations. Malgré la fraîcheur, je transpire et frissonne tout à la fois.
Un cri retenti alors que vient
vers moi une silhouette menue à masque de chienne, grande prêtresse, tenant par
la main deux louves aux poitrines opulentes, les seins ornés de serpents
d’airain entrelacés dont je reconnais les silhouettes. Un mâle à tête de hibou
porte derrière elle un pot contenant une peinture bleue et le présente au trio.
Elles me badigeonnent l’une après l’autre alors que le silence se fait et me
voilà détaché. Je tombe à quatre pattes et la Maîtresse de cérémonie tend la
longe fixée à mon collier vers les deux Louves qui m’entraînent à quatre
pattes, nu et enchaîné, à part sous le manteau de la nuit et l’œil argenté et
bienveillant d’Artémis chasseresse, dans les jardins d’Aphrodite Maîtresse des
plaisirs.
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