Entouré de paires de jambes et le frôlement des étoffes légères et chamarrées autour de moi, je note le mouvement circulaire dans lequel nous progressons. La chaleur et les senteurs entêtantes mêlées de tant de Féminités me font tourner la tête.
Leyla s’arrête soudain et je manque percuter l’arrière train du taureau qui
me précède. Le singe qui me suit n’a pas cette chance et je me dandine sentant
bouger en moi l’objet incongru qui y est fiché.
En dresseuse avisée tire sur ma laisse et me tance alors qu’autour de nous
d’autres font de même. Je lèche ses doigts peints pour me faire pardonner. Elle
me gratte la tête alors que la file reprend sa progression autour de la salle.
Je remarque les murs richement décorés de tapisseries rouges tendues sur les murs
et les tapis sous mes pattes.
Notre progression reprend. Je constate que les filles à l’étage supérieur
papotent doucement. Aussi, profitant d’un instant d’inattention, je tente de
communiquer avec d’autres mâles, sans grand succès. Un coup sur les fesses me
fait faire un écart. Leyla me tance à nouveau et tire sur ma laisse d’un coup
sec « vas-tu te tenir tranquille toutou mal élevé, tu nous fais
remarquer » me dit-elle en français.
Je tourne la tête et remarque derrière moi la rouquine dresseuse du chien
indélicat et la cane qui danse dans ses mains. Soudain je me fige réalisant la
nudité des autres mâles qui m’entourent et leur proximité dangereuse. Tiré en
avant d’un coup sur la laisse, j’obtempère. Des tintements de clochette et des
sons de cors parviennent à présent à mes oreilles à travers le brouhaha et
ponctuent à intervalles irréguliers notre progression.
A présent, je distingue à travers la foule une lueur indiquant que nous
approchons de notre but : le centre de la pièce et son attraction principale.
Murmures et bruissements d’étoffe s’amplifient. Des commentaires assourdis
parviennent en désordre à mes oreilles dont je perçois sans bien les
identifier, la diversité des langues.
Perdu, isolé dans cette immensité, je sens mon cœur battre la chamade alors
que nous parvenons en tête de file. Devant, le taureau et sa dresseuse avancent
et celle-ci confie la laisse à une gardienne du lieu qui l’entraîne élégamment
vers une estrade au fond de la pièce.
Je peux tout à loisir l’observer évoluer. Fardée, un diadème argenté sur la
tête elle porte une tunique très courte, plissée, nouée à la grecque, laissant
apparaitre sa poitrine sur le devant et la naissance de ses fesses, ainsi que
des sandalettes à lanières brillantes et argentées à hauts talons effilés. Une
longue canne symbole de son autorité complète son équipement. A présent, je
peux même en distinguer plusieurs réparties autour de la salle.
J’observe la scène incongrue qui se déroule devant mes yeux. Le taureau est
présenté devant l’estrade et son trône doré, sans que je puisse voir ou
entendre distinctement ce qui s’y passe ou ce qui se dit, perdu que je suis
entre ombres et lumières. Le cor retenti alors que le malheureux, visiblement
contrit et réticent est entraîné par trois gardes vers la porte de gauche.
Au moment où nous avançons, je me retrouve et distingue enfin juchée sur
son trône, une silhouette Féminine et vaguement familière portant une tiare
dorée, une toge blanche nouée sur le devant et une cape rouge bordée d’hermine.
Des serpents métalliques sont enroulés sur ses seins et posent leur tête sur
ses tétons, la fixant du regard. Elle porte des sandales dorées faites de la
même manière que les gardes.
La gardienne revient à présent vers nous de ses pas légers et de sa
démarche chaloupée et gracieuse. Leyla a juste le temps de me gratter la tête
et de me glisser dans le creux de l’oreille « c’est Déesse, rend nous
fières ta Maîtresse et moi. » et se redressant lui tend la laisse.
Tiré en avant, je suis celle qui je
suis confié, le cœur battant, rougissant, observant pour la première fois avec
surprise, les robes rendues transparentes par ce contre-jour et les courbes
auparavant dissimulées qui se dévoilent sous mes yeux.
Troublé, je parviens aux pieds de celle qui est le centre de toutes les
attentions. Ses boucles blondes cascadent sur ses épaules, alors les reflets de
son loup doré m’empêchent de distinguer ses traits. Je n’en ai d’ailleurs pas
le loisir car la gardienne me fait mettre à genoux et baisser le regard.
« Le jour de mon jugement est venu ». Frissonnant et suant à
grandes eaux, j’attends impavide la décision. Une voix Féminine parvient à mes
oreilles « qui est celle que tu sers ? » surpris, je manque un
battement de cœur et bredouillant confusément un « Véronika… Je sers
Véronika Forget… »
La Reine du lieu se tourne alors lentement vers sa droite d’un air de
dédain, prête à lever
son sceptre quand enfin, je me reprends et parviens à
articuler « je sers Véronika Forget Déesse… » Ajoutant même plus fort
en me maclant la gorge « Et je lui appartiens Déesse. »
L’auguste personnage se retourne avec grâce, surprise et amusée vers moi et
tendant son pied, m’offre de le baiser. Je m’exécute sans discuter, alors que
retenti la clochette annonciatrice de succès.
La gardienne s’anime enfin et m’entraine à sa suite vers les portes de la
félicité, sous les clameurs et les discussions animées de l’assemblée à
laquelle rien n’a échappé. J’observe « Déesse » lever son sceptre et
les gardiennes tambouriner au sol de leur bâton pour ramener le calme dans
cette cours des miracles.
J'adore ta queue
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